La formation à distance pour le titre professionnel de formateur pour adulte s’inscrit dans un cadre réglementaire strict, reflet des exigences de qualité propres à ce secteur. Face à l’expansion des modalités distancielles, le législateur français a progressivement adapté les dispositifs juridiques encadrant cette certification professionnelle reconnue par l’État. Les organismes de formation doivent désormais naviguer entre les dispositions du Code du travail, les exigences de France compétences et les spécificités propres à cette modalité pédagogique. L’équilibre entre flexibilité d’apprentissage et garantie de compétences professionnelles constitue l’enjeu majeur de ce cadre normatif en constante évolution.
Fondements juridiques de la formation professionnelle à distance
Le cadre légal de la formation à distance pour le titre professionnel formateur pour adulte repose sur un socle réglementaire solide. La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a profondément transformé l’écosystème de la formation professionnelle en France. Cette réforme a intégré explicitement les modalités distancielles dans le périmètre des actions de formation éligibles aux financements publics et mutualisés.
L’article L.6313-2 du Code du travail définit désormais l’action de formation comme « un parcours pédagogique permettant d’atteindre un objectif professionnel », pouvant être réalisé « en tout ou partie à distance ». Cette reconnaissance légale constitue le fondement juridique sur lequel s’appuie toute l’architecture réglementaire de la formation à distance.
Le décret n°2018-1341 du 28 décembre 2018 précise les modalités de mise en œuvre des actions de formation professionnelle à distance. Il stipule notamment l’obligation pour les organismes de formation de :
- Mettre à disposition des moyens humains et techniques adaptés
- Assurer un accompagnement pédagogique
- Évaluer les acquis du stagiaire
- Garantir la traçabilité de l’assiduité
Pour le titre professionnel formateur pour adulte spécifiquement, l’arrêté du 22 octobre 2018 relatif au titre professionnel de formateur professionnel d’adultes constitue le texte de référence. Ce document précise les compétences attendues et les modalités d’évaluation, y compris pour les parcours réalisés à distance.
La circulaire DGEFP n°2001-22 du 20 juillet 2001, bien qu’ancienne, reste une référence pour définir les spécificités de la formation ouverte et à distance (FOAD). Elle a été complétée par des textes plus récents comme le décret n°2017-382 du 22 mars 2017 relatif aux parcours de formation, aux formes d’apprentissage et à l’accompagnement des stagiaires.
L’évolution juridique s’est accélérée avec la crise sanitaire de 2020. Le ministère du Travail a publié plusieurs textes d’adaptation pour faciliter le déploiement des formations à distance, dont certaines dispositions ont été pérennisées après la période d’urgence sanitaire. Ces adaptations ont directement impacté les modalités de délivrance du titre professionnel formateur pour adulte.
Exigences spécifiques pour les organismes dispensant le titre professionnel à distance
Les organismes souhaitant proposer le titre professionnel formateur pour adulte en modalité distancielle doivent satisfaire à des obligations spécifiques. La certification Qualiopi, rendue obligatoire depuis le 1er janvier 2022 par la loi du 5 septembre 2018, constitue un prérequis incontournable pour tout prestataire délivrant des actions concourant au développement des compétences.
Le référentiel national qualité comporte plusieurs indicateurs spécifiques aux formations à distance. Le critère 5 exige notamment que « les moyens pédagogiques et techniques » soient « adaptés à l’offre de formation ». Pour la formation à distance, l’indicateur 22 requiert explicitement « des moyens d’organisation, d’accompagnement ou d’assistance, pédagogique et technique, mis à disposition du stagiaire ».
Agrément et habilitation spécifiques
Au-delà de la certification qualité générique, les organismes souhaitant délivrer le titre professionnel formateur pour adulte doivent obtenir une habilitation spécifique délivrée par le ministère du Travail. Cette habilitation, encadrée par l’arrêté du 21 juillet 2016 relatif aux modalités d’agrément des organismes, prévoit des conditions particulières pour la modalité à distance.
Le dossier d’habilitation doit notamment détailler :
- La plateforme technique utilisée et ses fonctionnalités
- Les modalités d’accompagnement distanciel
- Le système de suivi de l’assiduité
- L’adaptation des modalités d’évaluation
La Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS) examine ces éléments avec une attention particulière. L’organisme doit démontrer sa capacité à garantir l’acquisition des compétences professionnelles identifiées dans le Référentiel Emploi Activités Compétences (REAC) du titre professionnel.
L’habilitation est accordée pour une durée maximale de cinq ans, mais peut faire l’objet de contrôles intermédiaires. La DREETS vérifie régulièrement le respect des engagements pris par l’organisme, particulièrement sur les aspects spécifiques à la formation à distance.
Depuis 2020, les exigences relatives aux plateformes techniques se sont renforcées. L’organisme doit garantir la cybersécurité des données, le respect du Règlement général sur la protection des données (RGPD), ainsi que l’accessibilité des contenus pour les personnes en situation de handicap, conformément à l’article L.5211-4 du Code du travail.
Modalités pédagogiques et techniques conformes à la réglementation
La mise en œuvre d’une formation à distance pour le titre professionnel formateur pour adulte doit respecter des normes pédagogiques et techniques précises. Le décret n°2018-1341 définit les caractéristiques d’une action de formation à distance conforme, incluant « une assistance technique et pédagogique appropriée pour accompagner le bénéficiaire dans le déroulement de son parcours ».
L’ingénierie pédagogique doit être spécifiquement adaptée aux contraintes du distanciel. Le Référentiel de Certification (RC) du titre professionnel formateur pour adulte identifie les compétences à valider, mais l’organisme de formation conserve une marge de manœuvre dans la construction du parcours distant, à condition de respecter certaines règles.
Exigences techniques de la plateforme d’apprentissage
La plateforme de formation à distance (Learning Management System ou LMS) utilisée doit répondre à des critères techniques précis :
- Traçabilité des connexions et des activités réalisées
- Système de mesure fiable du temps de formation
- Outils d’interaction synchrones et asynchrones
- Sécurisation des données personnelles
Le ministère du Travail a publié en 2019 un guide de bonnes pratiques précisant ces exigences techniques. La plateforme doit notamment garantir l’interopérabilité avec les systèmes d’information des financeurs et certificateurs, conformément aux standards du marché (SCORM, xAPI).
L’authentification des apprenants constitue un point critique du dispositif. L’organisme doit mettre en place des mécanismes permettant de s’assurer de l’identité de la personne suivant la formation et passant les évaluations. Les solutions biométriques ou de reconnaissance faciale se développent, mais doivent respecter les dispositions de la CNIL.
La Commission nationale de la certification professionnelle (CNCP), intégrée à France compétences, vérifie lors de l’enregistrement ou du renouvellement du titre au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) que ces modalités techniques garantissent l’acquisition effective des compétences professionnelles.
Organisation des évaluations et des jurys
Le Référentiel de Certification du titre professionnel formateur pour adulte prévoit des modalités d’évaluation qui doivent être adaptées au format distanciel, sans en diminuer l’exigence. L’arrêté du 22 décembre 2015 modifié relatif aux conditions de délivrance du titre professionnel précise les conditions de mise en œuvre des sessions de validation.
Pour le titre professionnel formateur pour adulte, les évaluations comprennent généralement :
- La présentation d’un dossier professionnel (DP)
- Une mise en situation professionnelle
- Un entretien final avec le jury
Dans le cadre d’une formation à distance, l’organisme doit garantir l’authenticité des productions et la fiabilité des évaluations. Les sessions d’examen peuvent se dérouler en présentiel, même si la formation a été suivie à distance. Toutefois, depuis 2020, des adaptations permettent la tenue de jurys à distance, selon des modalités strictement encadrées par la DGEFP.
Financement et contractualisation de la formation à distance
Le financement des formations à distance pour le titre professionnel formateur pour adulte obéit à des règles spécifiques. La loi du 5 septembre 2018 a modifié les modalités de prise en charge par les financeurs publics et paritaires, avec un impact direct sur la contractualisation entre les parties.
Les opérateurs de compétences (OPCO), en charge du financement de l’alternance et du plan de développement des compétences des entreprises de moins de 50 salariés, ont développé des critères spécifiques pour la prise en charge des formations à distance. Ces critères portent notamment sur :
- La part minimale d’accompagnement humain
- Les justificatifs d’assiduité recevables
- Les modalités de facturation
La Caisse des dépôts et consignations, gestionnaire du Compte Personnel de Formation (CPF), impose également des conditions particulières pour les formations distancielles. La description précise des modalités pédagogiques sur la plateforme Mon Compte Formation constitue une obligation légale, avec des mentions obligatoires concernant les moyens d’assistance technique et pédagogique.
Conventions et contrats adaptés à la formation à distance
Les contrats et conventions de formation professionnelle doivent comporter des clauses spécifiques pour la formation à distance. L’article D.6353-3 du Code du travail précise que pour les actions de formation comportant des séquences à distance, la convention doit préciser :
- La nature des travaux demandés au stagiaire
- Le temps estimé pour les réaliser
- Les modalités de suivi et d’évaluation
- Les moyens d’organisation, d’accompagnement ou d’assistance
Le contrat de formation professionnelle conclu avec un particulier doit être particulièrement vigilant sur ces aspects. Le délai de rétractation de 14 jours prévu par le Code de la consommation s’applique, avec des spécificités pour les formations débutant avant la fin de ce délai.
La facturation des formations à distance fait l’objet d’une attention particulière des services de contrôle. Le décret n°2018-1341 permet une facturation au forfait, sans référence obligatoire à un nombre d’heures, à condition que la convention précise les moyens d’organisation, d’accompagnement et d’assistance mis à disposition.
Les DREETS et les OPCO vérifient régulièrement la conformité de ces documents contractuels. Les organismes délivrant le titre professionnel formateur pour adulte doivent donc porter une attention particulière à la rédaction de ces conventions, sous peine de voir leurs financements remis en cause.
Évolutions réglementaires et perspectives pour la certification à distance
Le cadre juridique de la formation à distance pour le titre professionnel formateur pour adulte connaît une dynamique d’évolution constante. Les retours d’expérience de la période de crise sanitaire ont accéléré certaines adaptations réglementaires, désormais inscrites dans le droit commun.
La digitalisation des certifications professionnelles constitue un axe stratégique pour le ministère du Travail. Le projet de dématérialisation des titres professionnels, initié en 2019, prévoit la création d’un système d’information unifié permettant le suivi digital complet du parcours de certification, de l’inscription jusqu’à la délivrance du parchemin.
Vers une hybridation croissante des parcours
L’évolution réglementaire tend vers une reconnaissance accrue des parcours hybrides, mêlant présentiel et distanciel. Le décret n°2021-1404 du 29 octobre 2021 a renforcé cette tendance en précisant les conditions dans lesquelles les formations en apprentissage peuvent être dispensées à distance, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives pour le titre professionnel formateur pour adulte.
Les blocs de compétences, introduits par la loi du 5 mars 2014 et renforcés par celle du 5 septembre 2018, facilitent cette hybridation. Le titre professionnel formateur pour adulte est structuré en deux blocs :
- Préparer et animer des actions de formation collectives
- Construire des parcours individualisés et accompagner les apprenants
Cette structuration permet une acquisition progressive des compétences, avec des modalités pédagogiques potentiellement différentes selon les blocs. La réglementation autorise désormais explicitement cette modularisation, facilitant ainsi l’intégration de séquences distancielles ciblées.
La validation des acquis de l’expérience (VAE) pour le titre professionnel formateur pour adulte bénéficie également d’évolutions réglementaires favorisant le distanciel. La loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification a introduit la possibilité d’un accompagnement VAE entièrement à distance.
Défis juridiques émergents
L’encadrement juridique de la formation à distance doit relever plusieurs défis émergents. La cybersécurité des plateformes de formation constitue une préoccupation croissante. Le règlement européen sur la cybersécurité (Cybersecurity Act) impose des obligations renforcées aux prestataires numériques, y compris les organismes de formation opérant des plateformes d’apprentissage.
La question de la propriété intellectuelle des contenus pédagogiques digitaux fait l’objet d’une attention particulière. Le Code de la propriété intellectuelle protège ces créations, mais les contrats entre formateurs et organismes de formation doivent préciser clairement les droits de chacun, particulièrement dans un contexte où les contenus peuvent être réutilisés pour de multiples sessions.
L’intelligence artificielle appliquée à la formation soulève également des questions juridiques nouvelles. L’utilisation d’outils d’IA pour personnaliser les parcours ou évaluer les productions des apprenants doit respecter le cadre éthique et juridique en construction. Le futur règlement européen sur l’IA aura un impact direct sur ces pratiques pédagogiques innovantes.
Les organismes délivrant le titre professionnel formateur pour adulte à distance doivent donc maintenir une veille juridique active pour adapter leurs pratiques à ce cadre normatif en constante évolution. La Direction générale de l’emploi et de la formation professionnelle (DGEFP) publie régulièrement des notes d’information et des questions-réponses pour accompagner cette adaptation.
Recommandations pratiques pour une conformité optimale
Face à la complexité du cadre juridique encadrant la formation à distance pour le titre professionnel formateur pour adulte, plusieurs recommandations pratiques peuvent être formulées à destination des organismes de formation. Ces préconisations visent à garantir une conformité optimale et à prévenir les risques juridiques.
La mise en place d’un système qualité robuste constitue le premier levier d’action. Au-delà de la certification Qualiopi obligatoire, l’organisme gagne à structurer ses processus selon les principes de la norme ISO 21001 spécifique aux organismes d’éducation et de formation. Cette démarche facilite la traçabilité des actions et la démonstration de conformité en cas de contrôle.
Documentation et preuves à conserver
La constitution d’un dossier de preuves complet représente une sécurité juridique majeure. Pour chaque session de formation à distance, l’organisme doit conserver :
- Les logs de connexion horodatés et nominatifs
- Les échanges pédagogiques entre formateurs et apprenants
- Les travaux intermédiaires et évaluations formatives
- Les attestations d’assiduité générées par la plateforme
Ces éléments doivent être conservés pendant une durée minimale de trois ans, conformément à l’article R.6351-6 du Code du travail. Les organismes soumis à des financements publics peuvent être contrôlés jusqu’à cinq ans après la fin de l’action par certains financeurs comme Pôle emploi ou les Conseils régionaux.
La contractualisation avec les apprenants et les financeurs mérite une attention particulière. Les documents doivent être rédigés avec précision, en évitant les formules génériques. La description des modalités distancielles doit être suffisamment détaillée pour éviter toute contestation ultérieure sur la nature ou l’étendue des prestations fournies.
Gestion des situations particulières
Certaines situations spécifiques nécessitent une vigilance accrue :
L’abandon en cours de formation à distance doit faire l’objet d’une procédure formalisée. L’organisme doit pouvoir démontrer ses tentatives de remobilisation de l’apprenant avant de constater l’abandon. Cette traçabilité est déterminante pour justifier une facturation partielle auprès des financeurs.
Les adaptations pour les personnes en situation de handicap constituent une obligation légale renforcée par la loi du 5 septembre 2018. L’accessibilité des plateformes et des contenus doit être pensée dès la conception du dispositif, en se référant aux Règles pour l’accessibilité des contenus Web (WCAG).
La formation en situation de travail (AFEST), reconnue depuis 2018 comme modalité pédagogique à part entière, peut être combinée avec des séquences à distance. Cette hybridation doit respecter les exigences propres à chaque modalité, notamment l’alternance de phases réflexives et de mises en situation pour l’AFEST.
Les organismes délivrant le titre professionnel formateur pour adulte à distance peuvent s’appuyer sur les ressources proposées par le Centre Inffo et la Fédération de la Formation Professionnelle (FFP). Ces institutions publient régulièrement des guides pratiques et des modèles de documents conformes aux exigences réglementaires les plus récentes.
La désignation d’un référent juridique au sein de l’organisme, chargé de la veille réglementaire et de la mise à jour des procédures, constitue une pratique recommandée. Cette fonction peut être mutualisée entre plusieurs petits organismes pour en partager les coûts tout en garantissant une expertise de qualité.

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